Une voix prophétique semble s'élever de ce spectacle mystérieux, et tandis qu'on assiste à la difficulté de la misère, du déclassement social brutal, du confinement dans des zones ghettoïsées, du détraquement progressif d'un rêve qui se casse la figure comme une musique dissonante se désaccorde, ne laissant que cendres sur le plateau, on ne peut que constater que l'on a assisté à une situation bien plus universelle, et bien plus répétée que ce simple exemple des années 20 et de la guerre civile russe ; et la folie des personnages prend un tout autre écho dans nos sociétés modernes.
Auteur : louiserulh
Les trois sœurs d’après Tchekhov par Simon Stone
Le jeu de la grande troupe réunie par Stone soutient de manière très belle la redoutable machine de guerre qu'il met en place, montrant la petitesse de l'individu et son écrasement dans un monde qui le dépasse ; créant ainsi un comique du drame de son aspect dérisoire.
Solaris, d’après Stanislas Lem, mis en scène par Rémi Prin (Cie le Tambour des Limbes)
Comme toujours, c'est donc en étant mis face à la diversité, que l'homme enclenche un mécanisme d'introspection et d'auto-réflexion : c'est ce qui fait que les scientifiques réfléchissent à ce qui fonde leur humanité dans la pièce, c'est aussi le mécanisme à la base de la science fiction, et enfin celui à l'origine du théâtre. Ainsi, l'activité humaine semble permettre de réfléchir sur l'humanité, ce qui la fonde et ce qui la menace, et ce sont ces enjeux philosophiques qui forment le cœur et l'essence de ce projet.
Triiio, par Alain Reynaud, Alain Simon, Heinzi Lorenzen et Gabriel Chamé Buendia
Le burlesque et le grotesque qui déclenchent le rire cachent, comme souvent, une angoisse profonde de l'existence et un art du raté, qui fait rire le public seulement parce qu'il est ressenti comme sans conséquence et parce qu'il arrive à un autre. Cette ambiguïté du rire vient donner une profondeur à ce spectacle qui parle donc différemment mais avec le même plaisir à des public divers et de tous âges.
Al Atlal, chant pour ma mère, par Norah Krief
Norah Krief entre sur scène. Elle se met à chanter, elle rajeunit alors de 10 ans. Elle se place ensuite, humblement, en spectatrice de ses musiciens. Elle rajeunit alors encore. A la fin du spectacle, au bout de cette heure de doux voyage, le miracle est accompli, et Norah Krief n'a plus que 10 ans, ou peut-être 1000. Et quand Norah Krief sort de scène, elle ne quitte jamais nos esprits ni nos cœurs.
Mirages et miracles, une exposition d’Adrien M et Claire B
Alors l'expérience est aussi belle que terrifiante. Mais elle parvient surtout à provoquer le débat, à amener des questions, qu'on aurait tendance à accepter en tant que telles, sur le devant de la scène, à nous pousser à nous interroger sur ces nouveautés et leurs implications. Car si elles ne sont qu'outils, et peuvent donc être utilisées par les hommes pour des activités nobles et humaines, les potentiels excès qui les entourent peuvent aussi inquiéter, tant qu'on ne prend pas conscience de leur nécessaire contrôle. Mais le pari de créer du beau, sous différentes formes, avec l'aide du numérique est remporté ici par le duo d'artiste.
