Critique de spectacle, Edinburgh Festival FRINGE, Festival d'Edinburgh 2017

Birthday Cake by the KCS Theatre Company

Pour l’édition 2017 du Festival d’Edinburgh, le FRINGE

Birthday Cake by the KCS Theatre Company directed by Davina Barron and written by Daniel Bishop

The Vultures of Voyeurism / Les Rapaces du Voyeurisme

Traverser l’épreuve d’un deuil est toujours difficile, mais elle peut être traumatisante quand elle est vécue par une bande de jeunes, particulièrement quand la mort en question est brutale et inattendue, comme l’assassinat un soir d’un jeune dans la rue. Dans de telles circonstances, le deuil ne peut être fait qu’après une rationalisation des faits, pour essayer de dépasser le traumatisme. Ce spectacle explore le ressenti d’un groupe de jeunes, principalement 4 d’entres-eux, 4 amis, et leurs tentatives pour comprendre les circonstances du drames. Aidés par le psychologue spécialisé recruté par leur lycée, ils tentent de mettre des mots sur leurs ressentis.

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© Birthday Cake/ Twitter of Drama department at King’s College School KCS Theatre Company / Edinburgh Festival FRINGE 2017

Dans un premier temps, cette aide, qui leur apparaît superficielle, est critiquée : l’espace dramaturgique est explosé, montrant chaque jeune dans un espace différent, alors que les mots du psychologue sont les mêmes pour tout le monde : le discours est montré comme identique donc impersonnel et inutile. Mais peu a peu le spectateur est amené à être mis à la place du thérapeute, témoin des témoignages des jeunes, et réalise l’importance de ce travail : 4 versions de la situation sont présentées par les amis de la victime, chacun persuadé de savoir pourquoi il a été tué ; mais ces 4 versions sont tellement différentes qu’elles semblent inconciliables.

En effet, même s’il n’y a qu’une seule victime il y a 4 manières différentes de vivre ce deuil car il y a 4 verités qui diffèrent les unes des autres : le personnage de la victime est construit au travers des perceptions qu’en ont ses camarades, il n’y a pas de vérité absolue sur lui ou sa personnalité. La réalité et la manière dont les personnages la décrivent est alterée par les jugements individuels et subjectifs qu’ils ont. La métaphore du gâteau est utlisée pour montrer à quel point, malgré la bonne volonté de chaque témoin, leurs versions divergent, chacun donnant dans sa version un nom de gateau différent pour celui que la victime aurait cuisiné, le matin même de sa mort, pour l’anniversaire de son père. On le sait bien, demander à plusieurs personnes qui ont assisté à la même scène de la raconter est la meilleure manière d’obtenir différentes versions de la même histoire.

La dramaturgie présente ces 4 versions de la vérite en presentant différentes scènes de vies, revécues par les protagonistes, sans fil chronologique : la construction de l’identité se fait par un portrait en actes, dans des scènes quotidiennes, qui permettent au spectateur de se glisser au cœur de la relation qu’entretenait chacun avec le mort. Un code couleur est utilisé pour différencier les 4 cercles de narration dans lesquels évolue le spectacle. Cette dramaturgie, mise en scène de manière tres intelligente par l’équipe, permet de mettre en parallèle les différents parcours dans un système complexe d’échos et de répétitions, dans un travail obsessionnel qui permet de souligner la ressemblance des situations sociales dans la mise en scene elle-même. La narration est unifieé et lineaire alors même qu’une mosaïque de moments est representée : la construction spatiotemporelle est perturbée pour construire des ponts dramaturgiques entre des situations sans lien evident entre elles.

Le travail de scénographie, utilisant la lumière pour créer les différents espaces séparant les différentes narrations permet de suivre sans difficulté ces differents espaces mentaux, matérialisés par des meubles métaphoriques d’une pièce dans une maison, lieu de l’intime et du partage.

Enfin, le spectacle traite de la manière de gérer un drame, personnellement mais aussi en tant que groupe : il montre comment les vies des proches de la victime seront modifiées de manière irremédiable, mais aussi comment ceux qui sont moins directement concernés ont tendance à réagir de manière relativement malsaine dans une telle situation. La métaphore du gâteau, reprise à la fin du spectacle, montre les rapaces du voyeurisme manger le gâteau et se nourrir des restes sur le cadavre encore chaud de la victime…

Louise Rulh

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