Jusqu’au 23 Juillet
Le Raoul Collectif (composé de cinq acteurs) nous propose une sorte de délire, parodie d’une émission de radio qui serait dite « intello » et dans laquelle se confondent et se superposent des égos à la mesure du savoir vain et stérile que ses chroniqueurs mettent en œuvre.
L’émission « épigraphe » propose des questionnements abscons sur la nature de l’homme ou sur la manière dont celui-ci pourrait s’accoutumer au monde. L’ensemble suit une logique absurde où les différentes interventions confinent parfois à l’arrogance ou la stupidité. Le Raoul Collectif engage une sorte d’écart entre des présupposés et des concepts intellectuels et la manière dont ceux-ci sont refondés par les chroniqueurs en une expression détournée et drolatique. Ainsi à partir d’une histoire singulière envoyée par une auditrice sur le possible vivre-ensemble d’une vache et d’un cheval, les chroniqueurs vont construire et sans cesse déconstruire leurs réflexions, se précipitant et se mordant les uns les autres pour avoir le mot le plus fin, le plus fini et le plus inébranlable qui puisse être. Au demeurant, de véritables personnalités émergent et des personnages finissent par se distinguer avec des caractères propices à une controverse intellectuelle ; chaque personnage poursuit sa propre conquête même si on remarque un personnage incertain, peu assurée de lui-même et qui a peine à se faire entendre et à prendre sa place notamment lorsqu’il présente sa liste d’animaux disparus ou étranges, moment de liste où chacun apporte sa petite touche personnelle, en rajoutant au bizarre, une bizarrerie briscarde et auto-suffisante.

L’émission de radio ne berce pourtant pas seulement dans l’absurde, elle revêt une certaine dimension satirique et la seconde partie du spectacle voit une mutation complète de l’horizon dramaturgique avec une explosion inconsolable. Le plateau se retrouve dans un lit de sable à l’appétence mexicaine, l’ensemble se teint d’une vague coloration mystique qui bientôt grandit et se perpétue dans l’irrésolution en raz de marée du spectacle. Les cinq comédiens font évoluer les actions en exploitant un comique de geste implacable et en surenchérissant les situations. Le propos politique du spectacle reste difficile à cerner, le « There is No Alternative » de Thatcher est convoqué et devient un personnage féminin travesti, TINA, qui va s’immiscer sur scène et répondre à des interrogations. La critique consciente du libéralisme totalitaire est présente, mais on ne comprend pas véritablement son implication, ce n’est qu’anecdotique dans le spectacle. Les comédiens n’en tirent pas véritablement une ligne de force dramaturgique, et même si le fait de vouloir tuer TINA avec un pistolet, de vouloir meurtrir une « idée » est une idée assez originale, son efficacité comique est en un sens beaucoup trop éloignée du reste du spectacle. Le montage des situations et l’agencement des situations finissent par devenir pesantes et comme la beauté qu’ils prétendent faire émerger est vide de sens et sensiblement désexualisée, on se rend compte très vite que ce spectacle constitue juste une sorte de proposition comique à la scénographie intéressante et aux individualités réfractaires.
Le Raoul Collectif nous emporte ainsi dans les coulisses et dans les couloirs d’une dernière émission de radio, dégageant toutes les possibles échéances et déchéances humaines que cela implique. Le spectacle offre un voyage tout en douceur dans l’absurde, dans une réflexion constamment en décalage, fondée sur des préjugés et de fausses sensations de bien-pensance…