Critique de spectacle

Une nuit à la présidence dans un texte et une mise en scène de Jean Louis Martinelli d’après des prémices initiés par Animata Traoré

Ce spectacle évoque le contexte politique des pays africains soumis à la tutelle de la France et en proie à un pillage par les plus grandes nations impérialistes. Il évoque une situation de corruption dans les pays africains, où les plus grandes multinationales pillent et exploitent les ressources des pays. Les personnages évoquent la situation douloureuse de la fuite et de l’émigration de ces pays africains rendus fragile et vulnérable, au service d’une caste qui sert les intérêts d’une minorité et des industriels étrangers. Il évoque à demi-mot la situation singulière du Burkina Faso et il rappelle la mémoire de Thomas Sankara, assassiné pour avoir osé critiquer la tutelle occidentale. Le contexte politique de l’Afrique est ainsi admirablement bien évoqué dans un texte à l’écriture épuré et sensible.

Le jeu des comédiens est en revanche moins bon, et les chants ne semblent pas très bien introduits dans la dramaturgie d’ensemble même si ils sont le reflet d’un engagement politique, leur musicalité semble discordante d’avec la pièce, elle est intégrée dans l’histoire, mais dans la mise en scène, elle n’a pas atteint toute la force et toute l’émotion qu’elle pourrait offrir.

Les comédiens n’étaient pas foncièrement mauvais mais leur jeu n’avait aucune véritable portée, ils ne poussaient pas le jeu au cœur de la souffrance de leur personnage, il n’en était que le lointain écho. On ne peut incomber la faute à leur prétendue retenue devant le président, le texte a cette chance de résonner pour le spectateur, il évoque des situations inextricables que le spectateur connaît bien et que qui le touche (à moins qu’il ne soutiennent de tels projets). Les comédiens pour ma part ne m’ont donné aucune émotion, l’ensemble manquait d’ampleur. Il leur manquait le souffle de la révolte. Je pense que si ils jouent ce spectacle au Burkina Faso, face à des gens qui vivent la situation qu’il décrivent dans leur quotidien, l’émotion serait autre, l’éveil des consciences serait d’autant plus probant que les gens retournant dans leur « logis » constaterait cette pénurie et ce manque, et ne se retrouverait pas tranquillement chez eux à passer un moment à discuter sur la qualité du spectacle qu’ils ont vu.

Ce spectacle est rare, mais il l’est d’autant plus qu’il est une vraie diatribe du pouvoir corrompu, il transmet des idées, il apporte de l’espoir.

De ce point de vue le seul comédien qui pousse son personnage à l’excès, c’est bien le président. En effet, celui-ci se retrouve à jouer un être indolent et entièrement hypocrite. Il incarne parfaitement le cynisme d’un tel président, il y met l’énergie nécessaire.

La mise en scène quant à elle est d’une très bonne facture, elle devient un espace de jeu assez simple, elle laisse une place entière au comédien, elle lui donne le lieu où montrer et exprimer son indignation. Ce spectacle est peut être un cabaret politique, mais dans l’état actuel des choses, il ne l’ai qu’en partie. Les comédiens ne manquent pas de travail, ils manquent de convictions en tout cas chez ceux qui interprètent les jeunes musiciens. Que l’une des comédiennes soit la sœur de Thomas Sankara ne suffit pas, au parvis St Jean, ce spectacle ne peut avoir in fine tout l’écho qu’il devrait avoir.

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